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4 septembre 2022 7 04 /09 /septembre /2022 10:06

Tous l’été, nous avons été confrontés à des services d’urgences qui ont fermé faute de soignants. Par ailleurs, les maisons de santé sont désespérément vides faute de médecins. La rentrée scolaire est difficile par manque d’enseignants. De plus, ceux qui soignent, éduquent, protègent ou nourrissent présentent un taux de suicide deux fois supérieur à la moyenne nationale. Ces métiers ne sont d’ailleurs pas les seuls toucher par un manque de moyen humain. De nombreux autres, aujourd’hui, font face à des vagues de démission ou à des difficultés de recrutement. Pourtant être médecin, soignant ou enseignant a longtemps été considéré comme le graal des métiers et faisait la fierté de notre République (cf. les french doctors), riche d’un prestige qui les rendait attractifs. On se précipitait dans ces formations. Alors comment comprendre que de moins en moins de personne veuillent exercer ces métiers, laissant la population dans le désarroi, au risque de déstabiliser notre pays. En effet, comment la République peut tenir si on ne peut s’y soigner ni s’éduquer ?

Tout cela arrive parce que notre pays semble souffrir du syndrome de la tranche de jambon. Cette maladie est le fruit de l’action cumulée de nombreux de décideurs bien intentionnés qui réfléchissent de façon administrative, sans lever le bout du nez de leur logique, pour prendre conscience de l’impact de leur décision sur le fonctionnement de la société.

Pour comprendre ce syndrome, prenons l’exemple fictif d’une tranche de Jambon passée au crible de notre administration.

  • Un premier haut fonctionnaire se préoccupant de la qualité des produits estime que la couenne qui entoure le jambon dénature le produit. Elle est rarement mangée et finit très fréquemment à la poubelle, ce qui est source d’un immense gâchis. Il décide donc que dorénavant le jambon sera vendu sans elle.
  • Un autre haut fonctionnaire se préoccupant des normes ISO remarque avec justesse que la qualité de la tranche de jambon n’est pas homogène et qu’il y a très souvent des morceaux de gras qui viennent s’immiscer en son cœur. Il décrète qu’ils doivent être retirés pour que tous les morceaux de jambons aient une qualité équivalente.
  • Le ministre de l’Agriculture a demandé que dorénavant le prix du jambon soit contrôlé pour permettre à tous les citoyens d’accéder à ce produit de base. Il sera désormais de 25 euros le kg. Cela sera aux industriels de se débrouiller pour proposer un produit qui rentre dans ce prix… L’accessibilité aux produits de consommation est un combat pour lui.
  • Le ministre de la Santé lance une campagne contre l’hypertension. Pour cela, il fait la chasse au sel dans les produits de l’agro-alimentaire. Echaudé par la crise du sang contaminé qui a traumatisé la classe politique, il ne veut pas être responsable d’un scandale sanitaire dû à l’excès de sel dans la tranche de jambon. Il demande dorénavant que celle-ci soit vendue sans sel ajouté.
  • Enfin, le délégué aux handicapés fait remarquer qu’en France, il existe de nombreuses personnes qui n’ont pas de dent et qui peuvent se sentir discriminer par une tranche de jambon solide. Pour répondre aux exigences d’égalité de notre République, il impose que la tranche de jambon soit proposée mixé à tous. Dent ou sans dent, la même tranche de jambon pour tous est son slogan !

Ainsi, notre tranche de jambon passée entre les mains de toutes ces personnes bien pensantes et défendant de juste valeurs se retrouve immangeable !

C’est le même mécanisme, quel que soit les orientations politiques, qui a agi sur notre système de santé et notre système éducatif et qui a dénaturé ces professions. Ces décideurs ont cependant oublié que ce ne sont pas des règles qui soignent ou éduquent mais des personnes. Cette dictature administrative a vidé de son essence ces fabuleuses professions et à fait fuir les professionnels nécessaires. Les soignants et les enseignants ne veulent plus être pris pour des tranches de jambon et préfère faire d’autres métiers. Ils ne veulent plsu que d'autres imposent de choix déconnecter de leur pratique et que leur métier soit vider de son essence.

Le syndrome de la tranche de jambon est le fruit de l’idiocratie collective évoquée dans le livre de Guillaume Erner « Rater est un art ». Notre vision administrative et soviétique de la gestion de notre pays, pétrie de bonnes intentions, oublie de regarder comment fonctionne les décisions prises. Nos hauts-fonctionnaires ont oublié que les règles sont au service des hommes pour construire un compromis social et non l’inverse. Faute de soignants et d’enseignant, devant l’avidité d’une société consumériste et infantilisé, ne pouvant faire face faute de moyens humains et savoir changer de logiciel, notre pays risque de rentrer dans une nouvelle crise de société. Sommes-nous capables de changer de perspective dans notre gouvernance et de passer à l’ACT[1]  pour une société plus fonctionnelle et aux actions plus contextuelles aux métiers de chacun!

 

 


[1] Acceptance and commitment therapy

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