Nous jugeons bon ce que nous désirons (Spinoza) et non le contraire. Désirer ce qui est bon, c’est un des écueils de la quête amoureuse qui nous amène à juger bon pour nous un être que nous désirons. Cependant, une fois le désir retombé, la réalité nous présente un partenaire qui n’est pas toujours aussi bon pour nous. Dans l’art de la drague, une approche est de faire générer par le garçon du désir chez l’autre, la femme, afin qu’elle nous trouve « bon » au moins le temps d’une rencontre. C’est ainsi que fonctionne le marketing amoureux que maitrise les séducteurs qui vivent dans l’instant de la rencontre. Casanova était séducteur, générer le désir, et se sentir aimer le rassurait le temps d’un instant.
En fait, tout le marketing commercial fonctionne ainsi : générer du désir afin que nous jugions bon le produit et que cela se traduise par un comportement d’achat. Combien d’objet avons-nous juger bon et avons-nous acheter et qui s’accumule dans un coin de notre maison ? Notre tête nous raconte de nombreuses histoires de besoins matériels et amoureux.
Nos désirs se nourrissent de nos besoins : sécurité, reconnaissance, considération, amour, apaisement, etc. Lorsqu’ils s’enflamment deviennent passions. Pour certains, ils prennent la forme de discours et de jugement, pour d’autres d’actions.
La mauvaise foi se nourrit elle de la difficulté à renoncer à ce que nous désirons ? Comme être aimer ou reconnu ? Tout serait bon pour ne pas être au contact de la sensation de ne pas être à la hauteur ?
Le désir nous amène dans une quête avide. Cette quête nous protège de l’angoisse de la solitude que nous observons lorsque nous nous détachons du troupeau mu par ce désir collectif. Arrivé à dépasser cette angoisse, en accueillant notre fragilité et notre impermanence, ouvre à une joie et à une plénitude. Nous pouvons ainsi observer et savourer la beauté de ce qui est et de ce que nous sommes comme une expérience unique et précieuse qui n’existe que dans cet instant.
A tout cela se pose la question existentielle suivante. Que choisir : la fièvre et à la jouissance de la passion quitte à se fourvoyer et à se noyer d’illusions ou la satisfaction paisible de nos besoins en s’émancipant du prisme déformant des désirs afin de gagner en pleine conscience ? Que préférez ? Une vie consommatrice de désir et de passion source de nombreux rebus et de déchets, une fois ceux-ci passés pour se jeter dans d’autres ? Ou une vie plus consciente qui butine et qui négocie l’instant avec justesse ?
La question se pose à titre individuelle. Mais d’un point de vue collectif, cette vie de désir et de passion est source de mouvement qui font tanguer la terre : déchets, pollution, accumulation, industrialisation, etc. En outre, est-ce que nos désirs et passions sont authentiques ou instrumentalisés par la société de consommation ? Voulons-nous être libre, authentique et autonome ou fiévreux, passionnés au risque d’être dépendant et le jouet d’autres ?
Est-ce que parce que j’ai peu de désir que je peux observer le monde au plus proche de sa réalité ? Comme je n’attends rien de celle-ci pour juste la vivre, j’ai l’impression d’être plus en connexion avec celle-ci pour choisir et m’ajuster. François
La pleine conscience et la défusion (faire la différence entre soi et ses pensées) permettent d’essayer d’appréhender au plus près de la réalité ce qui se présente à nous afin de ne pas être trop dans la réaction mais dans l’accueil pour choisir comment nous allons négocier ce qui se présente à soi.
Désir d’exister et de ne pas être dissous dans le groupe qui amène à s’agiter, quitte à griffer l’entourage pour dire que je suis moi et non mélangé au groupe. Cette difficulté d’être que l’on a appelé fragilité narcissique amène à parler, à travailler, à s’agiter, à batailler ou à faire du sport.
On a souvent émis l’hypothèse que les sportifs compétiteurs étaient, pour certains, des personnes ayant une fragilité narcissique. Face à la difficulté d’être, ils auraient besoin de faire et de refaire dans un système sportif qui leur donne d’une main ce que leur retire le lendemain une autre main. Les titres sont éphémères et amènent à recommencer la compétition dans une addiction à la gagne. Combien de sportifs addictent à la gagne, malgré tous leurs titres, ont continué à se doper en fin de carrière pour à nouveau pouvoir renouer avec ce sentiment de la gagne.
Le désir prend de nombreuses formes et nous donnent à penser et parfois à nous illusionner. Il fait le sel de la vie mais nous pique parfois. La mode est plus au désir de consommation qu’au désir passionnel et à ses excès que notre société semble moins tolérer. La force obscure de la force n'est plus à la mode.