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12 mars 2023 7 12 /03 /mars /2023 11:21

Récemment, j’ai été interviewé par une journaliste intervenant dans le domaine de la chirurgie esthétique. Au cours de notre discussion, elle m’a évoqué que, selon elle, toutes les femmes ont « subi » cette phrase de leur conjoint : Je te préfère au réveil le matin. Pour elle, cette phrase n’était pas valorisante alors qu’elle mettait tant d’effort pour se faire belle le matin.

Ce partage m’a surpris, car bien qu’étant un homme, je n’ai jamais employé cette sentence. Lui partageant cela, elle a insisté en disant que c’était un marronnier entre femmes d’évoquer cette fameuse phrase. Elle l’interprétait comme quoi il ne fallait pas qu’elle soit trop belle pour son conjoint.

Tout cela m’a donné à réfléchir sur ce qui se joue pour les femmes et les hommes qui vivent cette phrase et qu’elle est la différence entre l’apparence du matin et celle de la journée.

Ma tête me raconte qu’au cours de la journée, pour certains nous sommes apprêtés, en représentation en montrant notre vitrine et non notre être. Le matin nous sommes à nu. A l’éveil, on montre ce que l’on est, c’est-à-dire notre cœur, nos émotions, notre sensibilité… Il n’y a pas encore de masque pour tenter d’avoir l’air.

Or lorsque l’on est amoureux, comme dit le renard dans le Petit Prince, on regarde désormais l’autre avec le cœur et non avec les yeux. Aimé, c’est avoir de la tendresse pour les fragilités de l’autre qui font toute son humanité. Alors, peut-être, lorsque l’on dit à l’autre cette fameuse phrase, c’est une façon de dire que l’on l’aime tel qu’il est et non son image, que l’on prend plaisir à être connecté à lui, que l’on a envie d’authenticité.

Cela demande à l’autre de faire de la place à sa sensibilité, d’oser être soi, d’être capable de se montrer à nu, d’authenticité et de faire taire cette machine à jugement qui font que les filles ont tendance à se basher naturellement comme la très bien écrit Sophie Cheval dans son livre Belle Autrement.

Dans le documentaire, Tout va bien le premier commandement du clown, on suit des élèves dans une école pour apprendre le métier de clown. A la fin de leur formation, une fois clown, ils se mettent par deux, droit et sans bouger, dans des espaces publiques : métro, centre commerciale, etc. La foule passe à côté sans jeter un regard. J’ai pu vérifier auprès du réalisateur que c’était bien le reflet de la réalité et non le fruit du montage. Devant cette expérience, je ris en pensant à tout le temps, l’argent et l’énergie que l’on met le matin pour avoir l’air, alors que la plupart des personnes n’en ont rien à foutre.

Dans quel état abordez-vous le matin ?

  • Le réveil peut être un moment magique lorsque l’on ouvre les yeux pour savourer les premières couleurs du matin, lorsqu’on est dans une posture contemplative, disponible à la rencontre avec soi et son partenaire, lorsqu’on est dans l’ouverture, lorsqu’on dit bonjour à la vie avec gourmandise et bienveillance, lorsqu’on est bien ancré dans le présent du moelleux de nos draps et des premières perceptions sensorielles…

 

  • Le réveil peut être douloureux lorsqu’on est trop chiffonné par la nuit, lorsqu’on démarre en lutte contre la vie et les autres, lorsqu’on est plus préoccupé par le discours de soi que d’oser être soi, lorsque notre agressivité nous déborde, lorsqu’on commence a faire la liste des choses à faire ou des soucis pour quitter le présent et se perdre dans le passé ou le futur…

En tout cas, pour moi, si la vitrine participe, lors d’une rencontre, à me faire rentrer la première fois au contact de l’autre, ce qui m’importe est principalement l’humanité de la personne qui me semble en effet notamment plus visible le matin. Il y a un moment possible d’authenticité et de tendresse au réveil. Le blabla de notre tête n’a pas encore eu le temps de formater notre visage et de le crisper. Le cœur s’exprime plus librement.
Et vous ? Est-ce que vous avez déjà dit cette phrase ou l’avez-vous entendue ? Comment êtes-vous le matin ? Qu’en pensez-vous ?

 

Boris Vian On tuera tous les affreux Livre de Poche

Sophie Cheval Belle Autrement Ed Armand Colin

Jean-Christophe Seznec J’arrête de lutter avec mon corps Ed Leducs

 

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commentaires

L
Quand j'entends ce genre de considération aliénante, je ne peux m'empêcher de penser à la souffrance qui se cache derrière.. la peur ne pas plaire, ne pas être aimable, à la hauteur, pas assez féminine, trop relax, tout le conditionnement "sois belle"...<br /> Cela me fait aussi penser à une amie quand j'étais plus jeune qui était choquée de me voir le matin, sans maquillage, décoiffée par la nuit, dans un vieux t-shirt (vieux mais doux et confort!). Elle se couchait le soir avec son maquillage et se levait toujours avant son chéri pour se remaquiller et se coiffer et portait nuisette toute l'année. Quel esclavage!!! crie la féministe que je suis!! C'est surtout très triste, et quelle place ça laisse dans la rencontre, la connexion à l'autre ? Quel type de relation peut-on nourrir quand on est prisonnière d'un tel carcan ? Et quel dommage de passer à côté de l'essentiel : la rencontre, la vraie, ( avec soi et l'autre) se fait sans froufrous. C'est tellement plus intense et doux à la fois. Et on choisit de garder les frous frous pour le plaisir !
Répondre
J
Tout à fait. Osons être soi et fier d'être soi, sans artifice