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25 novembre 2016 5 25 /11 /novembre /2016 22:05

La méditation est de plus en plus présente dans notre société. Elle fait la une de journaux. Elle est de plus en plus prescrite par les médecins notamment pour la prévention de la rechute dépressive et elle est portée par de nombreuses personnalités : Christophe André, Yasmine Liénard, Fabrice Midal, Bernard Giraudeau… Elle propose un nouveau paradigme à notre société même si elle est encore cantonnée principalement au soin et aux personnes sympathisants du bouddhisme et d’une culture new age. La diffusion de ce rapport à soi et aux autres est porteur de nombreuses vertus.

Sortir de la plainte

En France, nous passons beaucoup de temps à se plaindre de la société ou de nos comportements. On se plaint de son travail, de son poids, de sa façon de manger ou de consommer, du rapport que l’on entretient avec autrui. Nous n'avons jamais eu autant de choses à disposition (bien matériel, service, santé…) mais nous n'avons pas diminué le volume de nos plaintes. Est-ce le monde qui nous entoure qui va mal ou est-ce le rapport que nous entretenons avec lui qui est abimé? La pleine conscience, forme laïc de la méditation, est une piste pour faire évoluer ce ressenti sans prendre les armes pour faire la révolution.

La méditation est une pratique qui se développe fortement en occident notamment sous des formes laïcs. Il existe de plus en plus d'études scientifiques montrant les bienfaits de cette pratique sur le cerveau, la santé et les relations aux autres. Les études montrent que les méditants ont un sentiment de solitude moindre que les autres. Le fait de se connecter avec soi permet de se connecter aux autres. En travaillant sur notre rapport à nous même, nous pouvons impacter sur notre environnement. L'objectif est de sortir de la plainte qui alimente la souffrance pour devenir acteur de sa vie.

Se replacer au centre de soi

Une première étape du changement est probablement de s’occuper de soi et de restaurer son humanité. Plus nous nous comportons comme des consommateurs, des machines à acheter, à travailler, à regarder la télé, plus nous mettons notre vie en danger, celle des autres et celle de la planète toute entière. Sans travail sur notre intériorité et donc notre humanité, beaucoup d’efforts sont condamnés à n’être que des réponses ponctuelles, sans continuité, sans énergie, et sans possibilité d’être assez emblématiques et puissantes pour convaincre les autres. L’idée n’est pas de dénoncer la modernité mais de réfléchir à un meilleur usage de celle-ci plus adapté aux être humains que nous sommes.

De nombreux travaux montrent que le matérialisme entraîne de la souffrance contrairement à ce que notre société essaye de nous vendre (consommer pour être plus heureux, promesses de bonheur par la consommation). L’habituation hédonique est aliénante. Elle nous fait perdre le lien à nous-mêmes.

La posture de consommateur est source de moult problèmes et la question est comment se décontaminé de l’influence néfaste de cette société d’abondance :

  • La surexposition à la pléthore : on sait ainsi que les pays en développement passent de maladies des carences à des maladies de la pléthore, telle l'obésité. Kelly wilson[1] s’alarme de l’épidémie d’obésité aux USA ces dernières années qui sont directement à l’évolution de nos habitudes de vie. Ceci n’est pas sans conséquences car il rappelle que 55% des obèses ont un risque de dépression et que 58% des déprimés ont un risque d’obésité[2].  L’un des problèmes dans nos sociétés modernes est de savoir comment réagir à la pléthore : pléthore et abondance de nourriture, pléthore de distractions, pléthore de sollicitations, car l’on sait que la pléthore est dangereuse pour notre santé, la pléthore n'est pas une chance, la pléthore n’est pas une richesse. Le fait de vivre dans une société de pléthore et notamment de nourriture n'est pas une chance mais plutôt un problème. Une étude intéressante des tableaux représentant des scènes de repas depuis l'Antiquité à nos jours montre que les portions ont augmenté de 70 %.  La question est « qu’est-ce qu’on va faire de tout cela ? Est-ce que par exemple je vais me forcer à manger tt ce que j’ai ds mon assiette ? »
  • La surexposition à l’argent : Une étude a montré l’influence de l’argent sur nos attitudes. Dans celle-ci, un groupe était exposé à des images d’argent, l’autre non. Les personnes du groupe stimulés par ces images d’argent avait tendance à demander moins d’aide au cours de tâches mais aussi proposait moins d’aide et de conseils à leur congénère que le groupe contrôle et marquait une plus grande distance relationnelle. L’excitation liée à ces images font que les personnes sont moins proche des autres et moins solidaire.
  • La pléthore de stimuli sensoriels impactant notre attention : Dans la vie moderne et plus particulièrement dans la vie citadine, nous sommes bombardés de stimuli qui nous distraient : signes, images, bruits. Ces distractions sont source de problèmes attentionnels. Le zapping mental qu’engendre ces multiples stimulations est à l’origine de la difficulté à méditer du fait du tumulte de nos pensées. Notre attention s’envole dans tous les sens. Nous sommes happés par notre cerveau qui aime bien spontanément vagabonder spontanément (les pratiques qui se focalisent sur une cible mouvante telles le feu sont intéressantes dans ce contexte). Le manque de présence à soi fait que le réseau neuronal[3] par défaut de notre cerveau prend le relais et nous embarque dans ces rêveries. Par ailleurs, notre vie quotidienne nous encourage à se laisser porter en fragmentant notre pensée ce qui aboutit à une absence de connexion à soi.  Aussi, avant de changer le monde, il est nécessaire de renouer avec soi afin d'être présent à sa vie.

Une autre étude a été réalisée sur une population d’étudiants en théologie. Ces derniers avaient tous travailler un texte sur la compassion.  Une première moitié de ces théologiens ont été pressé de rendre leur texte sur leur lecture. La deuxième moitié ont été averti qu'ils avaient le temps pour rendre ce texte. Sur le chemin de retour de l'université, tous ces étudiants ont eu à être confrontés à un acteur complice de l’étude qui mimait une situation de souffrance. Seul un étudiant sur 10 du 1er groupe s'arrêtait et prêtait attention, alors qu'ils étaient 75 % dans le 2nd groupe. Tout ceci montre la facilité avec laquelle nos bonnes intentions et nos valeurs peuvent être bousculées par un sentiment d'urgence. Quelques soit nos croyances et nos engagements nous restons influençable et nous risquons de nous éloigner de nos valeurs. Cette expérience nous apprend à nous méfier de nous et particulièrement de tous ces moments où nous risquons d'être bousculé ou distraits et où nous risquons de perdre contact avec notre humanité. Nombre détails peuvent gêner nos élans à faire du bien autour de nous. Or, la société moderne de consommation met beaucoup d'énergie à accélérer notre temps et à nous distraire…

Que peut-on faire alors ?

  • Prendre conscience d’abord que cette pollution existentielle existe.
  • 0bserver l’impact qu’elle a sur nous, ne pas la sous-estimer mais adopter une position active face à elle.
  • Ecouter nos intuitions.

La société de consommation nous attire vers des distrateurs comme les nombreux écrans. C'est à chacun d'être actif pour régulièrement ralentir et se sevrer des ces stimulations. Il peut être intéressant de faire régulièrement l'expérience de s'arrêter pour prendre conscience de ce qui se passe en nous, de ce que nous ressentons et de ce que nous sommes malgré les tentations à faire ou à réagir.

Ce changement de posture peut se faire à titre personnel tout comme collectivement au niveau d'un groupe, d'une école, d'une entreprise ou de la société.

  • Examiner ce qui est important pour soi

On peut commencer par se mettre de temps en temps à l'écart mais sans se couper des autres pour prendre conscience de nos choix et de nos engagements dans des associations, mouvements ou au niveau politiques. En effet, examinons chacun pour soi son engagement pour les humains : que faisons-nous pour nous, pour les autres, pour la société à notre échelle. Il s'agit de prendre conscience de nos valeurs, de nos intentions et de nos actes réels. Stefan Zweig parle des « conditions nouvelles de notre existence, qui arrachent les hommes à tout recueillement et les jettent hors d'eux-mêmes, comme un incendie de forêt chasse les animaux de leurs profondes retraites ». Henry David Thoreau « pense que notre esprit peut être sans cesse profané par le fait d'assister régulièrement à des choses triviales, de sorte que toutes nos pensées seront teintées de vulgarité ». Nietzsche dit que « toutes les institutions humaines ne sont-elles pas destinées à empêcher les hommes de sentir leur vie à cause de la dispersion constante de leurs pensées ? » Einstein ajoute : « Notre époque se caractérise par une profusion de moyens mais une confusion des intentions ». Enfin, Pierre Rabhi dit : « Il nous faudra bien répondre à notre véritable vocation qui n’est pas de produire et de consommer sans fin mais d’aimer, d’admirer et de prendre soin de la vie sous toutes ses formes ».

Pour Henri Thoreau, il nous faut « simplifier, simplifier, simplifier ». C'est à dire « simplifier nos actions, simplifier nos paroles, simplifier nos pensées » pour s'inscrire la fraîcheur du moment présent. C’est souvent dans la simplicité que l’on trouve l’essentiel dans la vie, vivre l’instant présent.

Exercice : récitez cinq fois de suite ce mantra plusieurs fois par jour pendant plusieurs semaine : « je n’ai besoin de rien ».

La simplicité volontaire n’est pas de se priver ce qui serait absurde mais juste de subvenir à ses justes besoins. C'est comme marcher en montagne avec un sac à dos composé de 50% de provisions et de 50% de cailloux. La simplicité est de se débarrasser des cailloux. La simplicité est de ne pas laisser son esprit se laissé happer par toutes les distractions. Nous sommes happés par le miroir aux alouettes qui nous raconte qu’en ayant plus, on sera plus. Alors que le plus souvent, c’est dans cette simplicité qu’on trouve la véritable richesse intérieure.

  • Simplement s'asseoir

Prenons le temps de nous asseoir pour nous offrir un instant au contact de nous même. Quand on s’assoit, il est possible prendre contact non seulement avec son propre corps mais aussi avec la totalité de sa pensée. Cet exercice peut être fait à tout moment  ou que nous soyons. Le moment présent est toujours à coté de nous mais notre regard est souvent attiré ailleurs. Pourtant, c'est le seul temps où nous sommes vivant et là.

 

  • Cultiver la pleine conscience

Au début, certaines personnes peuvent voir un sentiment de chaos lorsqu'ils portent leur attention sur leur esprit. Aussi, il est nécessaire de trouver un point de stabilité dans la complexité de notre être afin de s'ancrer dans l'instant présent. Le plus simple est de se fixer sur le mouvement respiratoire afin de ne pas quitter notre être sans notre corps. Dans l'imaginaire de nos pensées ou de nos ruminations, notre corps n'est plus là. Rester au contact de son corps est un très bon véhicule pour naviguer dans l'instant présent et observer que nous sommes ballotés dans un lots de changements perpétuels : c'est l'impermanence. Par simplicité, nous appellerons cette prise de conscience "pleine conscience". La science a prouvé que cette pleine conscience a un potentiel de guérison très important (système cardio-vasculaire, humeur, attention, système immunitaire, etc.). Dans cette exercice, nous nous engageons avec autorité à être pleinement ce que nous sommes à cette instant de la respiration. Respiration consciente par respiration consciente, nous allons faire grandir les graines de notre être en les arrosant régulièrement afin qu'elles s'épanouissent. La pleine conscience revient à travailler nos résistances intérieures afin de les assouplir et étirer notre être comme nous travaillons un muscle pour gagner en clarté et en discernement. Ce travail sur notre flexibilité intérieure nous aidera à nous défaire de nos masques et de nos faussetés pour renouer avec l'être authentique que nous sommes : celui qui a une véritable valeur. En étant authentique nous arriverons à véritablement choisir nos actions tenant compte de notre forme du moment et du contexte. La véritable force ne tient pas en se forçant au bonheur mais en faisant de la place à toutes nos émotions et à nos fragilités. C'est ainsi que nous sommes de beaux humains. En faisant de l'espace en nous à travers ce mouvement respiratoire de pleine conscience nous pourrons habiter totalement notre être du bout des ongles jusqu'à l'extrémité de notre corps pour former un tout.

Au début, cette pleine conscience de ce que nous sommes à cet instant là ne dure que quelques secondes puis nous sommes attrapés par ce qui nous distrait habituellement. A nous de revenir aussi souvent que nécessaire à cette expérience sensorielle de l'instant pour que celui-ci dure plus longtemps.

Un jour, un chercheur a demandé au Dalai Lama quel avait été le moment le plus heureux de son existence, il avait répondu « I think, now ! ». En effet, si sa présence éveillée est de qualité à cet instant à quoi bon tenter de  faire revivre un passé qui n’était plus là ou anticiper un futur qui n’est pas là encore. Le passé a de l’importance uniquement pour son impact sur le moment présent. se projeter excessivement dans le futur peut engendrer des craintes ou des espoirs. Le bien-être profond n'existe que dans la fraîcheur du moment présent, qui est extrêmement clair, qui n’est pas rempli d’un contenu. C'est-à-dire lorsque que les pensées du passé sont déjà parties et avant que les pensées du futur n’envahissent notre conscience.

Le flot des pensées est tel que nous nous laissons aisément accrochés par celles-ci pour être embarqués ailleurs. En outre, une pensée donne naissance à une 2ème puis à une 3ème, et très rapidement nous nous retrouvons envahi envahis par ces pensées en chaine.

Il est possible d'apprendre à goûter à la fraicheur, à la transparence du moment présent malgré les pensées qui traversent notre conscience. Nous pouvons les voir comme des oiseau qui traverse le ciel sans laisser de trace. A nous d'apprendre à nous focaliser sur le ciel et non pas sur les oiseaux qui traversent celui-ci. Certains jours, il n'y que quelques oiseaux. d'autres jours nous observons des nuées d'oiseaux mais notre attention reste connectée au ciel.

Regardons la vie comme le ciel. Regardons les événements de vie comme un coucher de soleil et non pas comme des problèmes.

 

 

 


[1] Kelly G. Wilson, Ph.D. est professeur agrégé de psychologie à l’université de Mississippi. Il est l’un des développeurs de la thérapie ACT (Thérapie d’Acceptation et d’Engagement).

Ancien président de l’association pour la science comportementale contextuelle (ACBS), il dirige le centre de psychologie contextuelle au sein de l’Université du Mississippi (Center for Contextual Psychology) et est le directeur scientifique du Center for Hometown Science.

 

[2] http://www.cregg.org/site/motricite-et-nutrition/articles/991-congres-nutrition-2008-obesite-et-psychiatrie.html

[3] http://www.blog-lecerveau.org/blog/2012/03/19/le-reseau-cerebral-du-mode-par-defaut/

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